Michel Jaffrennou est mort

Michel Jaffrennou est mort. le premier jour de décembre, à Paris, d’une brusque hémorragie cérébrale.

Il avait été un des tout premiers artistes vidéo français, après Thierry Kuntzel et Patrick Prado, que j’avais envoyés au Chili pour rencontrer les artistes contribuant au jeune Festival Franco-Chilien d’Art Vidéo, le premier à qui j’avais confié la mission de choisir, en toute subjectivité, l’un d’eux, que j’inviterais à réaliser en France un journal de voyage. Il avait choisi, avec son flair infaillible, Magali Meneses. Elle est venue l’année suivante, en 1985, caméra paluche à la main, parrainée par Michel, voir les vidéastes français et Paris, et réaliser son journal avec une joyeuse liberté de ton et une charmante fantaisie graphique.

Pas une fois Michel n’a manqué, année après année, à son devoir chilien, accueillant tour à tour chacun des laureats du festival, toujours présent au dîner final, Chez Denise, traditionnel restaurant des Halles où j’assemblais autour du nouveau venu les anciens vidéastes français du Chili.

Maître du décalage, de la pirouette et de l’humour, artiste exigeant, rigoureux, qui montait des mécaniques folles et précises d’images, amoureux passionné de la couleur, il sut, à travers toutes les métamorphoses de son art, tenir le fil rouge de ses origines dada et lettriste.

Quand je l’ai rencontré, à la fin des années 70, il inventait sur de petites scènes le vidéo-café-théâtre, jonglait avec délices au milieu des rires du public des objets et de leurs images, transformait les téléviseurs en objets autonomes et magiques, perturbant joyeusement nos certitudes sur le réel et sa représentation. C’était son spectacle Les Totologiques. Je l’ai aussitôt envoyé faire une tournée en Yougoslavie, son téléviseur sous le bras et sur l’épaule la canne à pêche avec laquelle il y pêchait des poissons de papier. Après avoir adapté son spectacle en courtes séquences télévisées, il présenta sur la principale chaîne française la série quotidienne des Jim Tracking, clown désopilant qui se jouait de la télévision et des pixels.

Puis vinrent ses grands spectacles de vidéo-théâtre où il mêlait sur scène acteurs de chair et acteurs numériques. Parmi eux Electronique Vidéo Circus en 1984, avec 4 acteurs, 2 clowns et 50 moniteurs vidéo au Centre Georges Pompidou, l’apothéose de Vidéopérette en 1989, à la Grande Halle de la Villette, dont je réalisais en 1990 une adaptation combinant tous les médias, livre, jeu, papier peint vidéo, CD, sérigraphie : le coffret Vidéopérette édition multimédia, puis en 2001 le Web man show Diguiden au théâtre studio de la Comédie Française…

Parallèlement il exposait ses extraordinaires storyboards kilométriques où il dessinait et peignait seconde après seconde chaque détail de ses spectacles et qui avaient la double fonction de convaincre les commanditaires et de diriger techniciens et comédiens…

Jusqu’à sa mort à près de 80 ans, ce travailleur infatigable inventait sans relâche. Depuis 10 ans il réalisait jour après jour, de dessins, de peinture, de vidéos et de sons un livre infini, dont il savait qu’il ne l’achèverait jamais, et qui rejoindra à la Bibliothèque nationale de France l’ensemble ds ses archives, dont il lui a fait don.

Pascal-E. Gallet

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Traducción de la carta escrita por Pascal-E. Gallet a partir de la muerte de Michel Jaffrennou

Michel Jaffrennou ha muerto

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